dimanche 2 avril 2006

Le désordre

Le désordre institutionnel

            Avant de faire participer les citoyens à toute action publique, il est impératif de redéfinir les règles de la politique française, et de ne plus leurrer les français sur l’efficacité et la continuité d’un système qui ne sont pas même respectées au niveau des plus hautes instances de l’Etat.
            Nous le voyons actuellement à travers le règlement de la crise déclenchée par le CPE. Qu’il est loin le temps où notre président pouvait encore se délecter d’affirmer, en faisant allusion à un de ses ministres, « je dirige, il exécute ». Aujourd’hui, Jacques Chirac apparaît sans aucun pouvoir, complètement déconnecté de la réalité, tel un pantin récitant des allocutions rédigées par des conseillers, eux-mêmes ignorant où donner de la tête. Le premier ministre, quant à lui, bien que décrédibilisé par ses alliés et admirateurs d’hier, reste perché dans sa tour d’ivoire, sourd aux implorations de la « France d’en bas », comme la qualifiait si délicatement son prédécesseur. Heureusement, appelé à la rescousse, notre super héros national adepte de la « fracture » et des annonces type promotions chez Mr Bricolage (cf le Kärcher) vient nous sauver, défiant toutes les lois de nos institutions. Evidemment, l’heure est trop grave pour que le conseil constitutionnel se penche sur la question « La France gouvernée par un parti unique, l’UMP ». Il faut dire que les « sages » ont déjà bien travaillé sur la question du CPE, et il ne faudrait pas abusé de leur jeune âge, la jeunesse étant déjà bien assez malmenée aujourd’hui. Bref, pour résumer :
Un président « à la rue » mais pas dans la rue
Un premier ministre gonflé de fierté autocratique
Un sauveur multi usage qui fait concurrence à Monsieur Propre
Un parti unique, version démocratie totalitaire (?)

Le désordre politique

            Quelle crédibilité peuvent désormais avoir les politiques ? Nous voilà revenus en Gaulle, où nos ancêtres, divisés en une multitude de petites ethnies chacune ressemblant au village des fous d’Astérix, étaient incapables de se mettre d’accord sur un chef et une organisation qui leur auraient permis d’évoluer sans nécessairement faire appel à l’envahisseur.

            S’inclus dans ce désordre politique le fouillis inter et intra partis.
            Bien souvent lors des campagnes, on ne sait plus qui est à gauche, qui est à droite, qui est au centre, qui est extrémiste. De même, on ne distingue que querelles et mouvances au sein des partis. Ce manque de clarté, ajouté à l’absence d’amélioration de la vie quotidienne des Français, induit un désintéressement grandissant dans la société, à tel point que les citoyens disparaissent pour se transformer en consommateur. L’idée du pouvoir directionnel de la politique soumis au dictat de l’économie se répand donc. Il n’y a plus de réflexion, mais un laisser aller et laisser faire grandissants. Et il devient beaucoup plus simple et sensé d’être convaincu du « je consomme donc je suis » que du « je pense donc je suis ».
            La scène politique française est un bain de mousse dans un verre d’eau, où les bulles des différents partis explosent en se mélangeant et s’entrechoquant.

Idées pour une nouvelle Politique

Le politique de demain est à construire, les bases, à reconstruire.
            Tout d’abord, il falloir fédérer la nation autour d’objectifs communs. Ces objectifs doivent être fixés à différents niveaux, du dimensionnel (la ville, la région, le pays) au sectoriel (l’éducation, le social, la santé, la recherche, l’agriculture, l’industrie, le service…). Parallèlement à cela, il faudra mettre en place des plans d’évaluation et des indicateurs de mesure de la performance ; ce qui impose une parfaite transparence des politiques. Les Français doivent être guidés grâce à ces nouveaux repères à court, moyen et long terme, dans chacun des domaines qui les touche, directement ou indirectement. En regardant de l’avant de cette manière, le climat de confiance, qui est une des bases fondamentales pour avancer, ne peut que renaître. De la confiance, naît la motivation, de la motivation naît le résultat, du résultat naît l’ambition.
            C’est dans cette direction que les hommes et femmes politiques doivent aller. En plus d’être les médiateurs du vivre ensemble, en particulier pour les élus locaux, ils ont pour mission principale d’impulser ces mouvements, ces élans. Historiquement d’ailleurs, la France a toujours connu ses grandes heures sous l’égide de grands hommes (au passage, pourquoi pas aujourd’hui passer à l’ère des « Grandes Femmes »). Ne cherchons pas plus loin le succès de J-M Le Pen : il propose lui, une idée de la France dans un cadre bien précis. Dans un registre beaucoup plus vicieux et démagogique, Sarko fait de même.

            Quant à la démocratie participative, elle passe à mon sens avant tout par l’éducation et la formation. Quand je vois que des élèves de terminale ont arrêté les cours d’ECJS (Education Civique Juridique et Sociale) pour terminer le programme d’Histoire Géo, et qu’ils « trouvent ça mieux car l’ECJS, on n’en a pas besoin pour le bac », je me dis que la mesure prise pour introduire une conscience citoyenne chez les lycéens n’a été ni évaluée, ni appuyée comme il l’aurait fallu. Les professeurs n’ont certainement pas été assez formés et aidés sur ce point là.
            Eduquer les ados pour qu’ils deviennent des adultes citoyens avant d’être des adultes consommateurs ne suffit pas, il faut également éduquer les parents, ou encore former l’adulte à la parentalité. Les parents sont les premiers repères de l’enfant, les premiers à inculquer des valeurs. Bien souvent aujourd’hui, l’adulte parent n’a pas les capacités pour faire de son enfant un être humain avant d’en faire une machine à consommer ou à voter par SMS pour le dernier candidat de la Star Ac chaque semaine.
            Enfin, cette éducation doit se faire de manière verticale. Les personnes ayant des responsabilités doivent aussi avoir accès à un certain code de conduite, en particulier en politique. A mon avis, c’est la faillite de la famille « politique » qui est à l’origine de l’humeur noire des français, et non l’inverse. A travers les politiques d’urgence mises en ouvre depuis 93, c’est l’incapacité de la politique à nous projeter dans l’avenir qui s’est révélée. Comme si l’avenir n’existait pas, comme s’il n’y avait plus d’Histoire. C’est pour cette raison que nous sommes tous passés à côté des transformations du monde, et que nous n’avons tiré aucun bénéfice positif de la chance offerte par la mondialisation, aujourd’hui adulée ou haïe.

            Oui, nous voulons être acteurs des choix. Mais encore faut-il nous en donner les moyens. Au risque de passer pour élitiste, je considère que peu de français sont aptes à voter en leur âme et conscience. Le présupposé de la démocratie est l’égalité ? Soit. Dans ce cas, prenons le problème à la racine et pensons d’abord à être égaux devant l’éducation au lieu de l’endoctrinement, devant l’accès à l’information au lieu du contrôle des esprits, devant l’optimisme personnel (que j’ai du mal à percevoir) au lieu de l’optimisme collectif, devant l’intégration (il FAUT prononcer ce mot, car il y a énormément à faire de ce côté-là) au lieu de la communautarisation. Enfin, la France est un pays individualiste. Nous sommes obligés de composer avec ce sentiment qui fait partie de l’inconscient collectif. Je prône un individualisme responsable. Je ne veux pas de l’infantilisation de la société façon Sarkozy, qui est en somme un populisme décadent, d’où aucun progrès durable ne peut naître.
           
            Une politique adulte et clairvoyante ne peut se construire sans une société éduquée, responsabilisée et motivée. Mais pour cela, il serait temps que la politique française sorte de l’adolescence, en faisant preuve de plus de tolérance, d’écoute et de réflexion. C’est le concept de l’ « individu qui s’engage » qui est à revoir et à cadrer.

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